Le marché de la place d'Aligre

J’adore les marchés. Les étalages de fruits et de légumes surtout en été, je ne sais pas pourquoi, ça me rend dingue. Et généralement, j’ai la fibre acheteuse. Je rapporte à la maison de quoi nourrir une tripotée d’ados affamés. Ce matin, je suis Place d’Aligre, endroit magique du 12e arrondissement avec un marché qui a plus de 200 ans au compteur.

Ce marché, je le découvre par hasard il y a plusieurs années. J’ai réunion dans le coin et je déboule tranquille avec mon petit cartable. Je me souviens avoir stoppé net me demandant dans quel univers j’avais atterri. C’est un rendez-vous de brocanteurs sur la place et des commerçants de fruits et de légumes se partagent la rue d’Aligre. Il y a aussi un magnifique marché couvert. Je regrette de ne pas avoir pris mon cadi de mémère. Les marchands m’interpellent. J’adore leur formule indirecte « Elle veut deux choux-fleurs pour le prix d’un la p’tite dame ? » Euh non, mon gars, je vais refaire le monde mais pas de souci, je vais faire vite. » Quelques bla bla plus tard, je suis de retour. Je scande un « Oui, je veux bien maintenant vos choux cher monsieur le marchand ! ». Il me donne même un sac ce qui par les temps qui courent est assez rare. On croirait que certains commerçants ont des actions sur les sacs en plastique. Y’en a une que je tarterai avec plaisir mais pas sur le marché de cette place. La poulette me mettrait même les pommes de terre dans les mains. J’ai jamais de sac. Je l’énerve et pas qu’un peu. Et j’avoue que depuis plusieurs mois, je le fais exprès.

Je reviens à ma place d’Aligre en ce vendredi 25 de février. Fruits et légumes dans le cadi, je file retrouver avec plaisir une p’tite poulette qui vend chapeaux, écharpes et gants à des prix de ouf. Assise sur une chaise de camping et en tenue de ski, elle se lève d’un bond à mon arrivée. Pourtant, pas de neige artificielle à l’horizon. La Chine ne nous a pas livrés ses excédents. Elle est toute contente de me voir et moi aussi. On parle de tout, de rien quand tout à coup, sorti de nulle part, elle me dit :

  • Non mais c’est quoi ce Poutine ? On a eu la pandémie et voilà ce cinglé qui fout le bordel ! Comme si on avait besoin de ça !

Moi, tout en zieutant les écharpes et en essayant les chapeaux, j’acquiesce. Et elle continue :

  • Mais moi qu’on me laisse entrer en Russie, et je vais le tuer. C’est tout ! Y’a qu’ça à faire. Et vous avez, j’en suis capable. Il faut juste qu’on me fasse entrer dans le pays et qu’on me donne une arme.

Là, j’avoue que j’ai arrêté mes essayages et j’ai regardé la montagnarde de la Place d’Aligre. J’ai failli lui demander si elle savait où il habitait le Vladimir et comment elle comptait se rendre chez le fou furieux. Peut-être que sur les pages blanches, elle allait trouver V . Poutine, 6 Place du Kremlin. Et puis, un monsieur passe par là et nous dit que lui, voilà 20 ans, il était en Russie et que Poutine, il connaît bien et il nous parle du KGB, de la CIA. Il déroule tranquillement. L’alpiniste s’est tue. Et moi, j’attrape une écharpe bleue, ma foi très jolie. Le gars continue. Du coup, j’essaie un chapeau. Super ! Bon, il s’en va. La skieuse me demande si je le connais. Non ma cocotte, je n’ai jamais rencontré d’espion.

  • Un espion ? J’aurais dû lui demander de m’aider à rentrer en Russie.

Là, j’ai eu envie de rire et de l’embrasser. À la place, j’ai seulement acheté un chapeau.

J’adore ce marché.

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Commentaires

Catherine
il y a 3 ans

Ca fait une éternité que je n'y suis pas allée, mais c'est tellement ça !!