Ici Madame Oh là là !

Il est des moments magiques. Ce qui s'est passé en ce dimanche 8 mai en fut un.
Rien absolument rien ne me laisse croire que quelque chose se trame au royaume des surprises.

Nous avons levé nos verres en l'honneur du 4 mai chez des copains en début de soirée puis en tête à tête dans un restaurant. D'appels en messages, tous les amis avaient été au rendez-vous du rappel d'un an de plus. Et c'est donc fort logiquement que je laissais derrière moi le 4 mai 2022. 

Mais quelqu'un en décida autrement …

Un barbecue est programmé chez Marième et Christophe depuis quelques semaines. En revanche, ce qui l'est récemment, c'est la venue de Patricia le samedi après-midi à la maison. Lorsque la miss quitte Nîmes pour la région parisienne, elle passe en coup de vent. S'arrêter chez nous ? Oui. Belle idée. Mais pas le temps. Et curieusement, c'est ce week-end qu'elle y fait une halte. Chez Marième et Christophe ? Elle est invitée. Super. Mais voilà que le chanteur disparait des radars dès le samedi après-midi. Soirée musicale avec son grand pote, Jean-Luc. Pour le coup, cela me surprend qu'il aille pousser la chansonnette avec son compère je ne sais où pour l'anniversaire de je ne sais qui. Et voilà la Mistinguett arrivant avec sa bonne humeur et sa brandade alors que le gars prend tout son matériel d'artiste, nous laissant seules. Mais si il y a une chose que deux poulettes savent faire, c'est transformer une après-midi et soirée prévue à trois en un chouette moment à deux. Merci Patricia pour avoir jardiné, m'avoir suivie dans deux courses bien nazes et surtout pour avoir regardé la finale de la Coupe de France de foot. dont tu te fous comme de l'an 40. Mais sache que ce temps passé avec Toi pendant que le chanteur décortiquait les gambas à Saint-Maur a été aux petits oignons.

Je tairai toutes les questions posées quand l'artiste rentre, tard. Du "Alors, c'était chouette ?" à "C'était l'anniversaire de qui ? Une vieille pas comme moi ou une jeune plus tout à fait moi ?", il y a une ribambelle d'interrogations entre ces deux-là auxquelles il répond avec un aplomb incroyable. Du coup, je le crois. C'est pas charmant ?  

Et Dimanche arrive. Coup d'œil sur la météo. L'après-midi, prévue à 22° et ressentie à 25 augure une belle journée. Entre parenthèses, j'adore le "ressenti".
- Tu ressens quoi toi ? 23 ? Ah bon, parce qu'ils disent qu'on va ressentir 25 …"
- Moi je ressens 30 …
- Ah bon ??? Mais t'as pas de fièvre ?
Bon. Passons. Revenons à nous…

Dans la voiture qui nous emporte dans la banlieue cossue des bords de Marne, Christophe de Saint-Maur appelle. Je devine à la conversation qui s'engage une impatience concernant notre heure d'arrivée. C'est qu'il a un métier important : allumer le barbecue. Franchement, j'ai envie de rire et de lui dire "Calmos, mon gars, il n'est que 12h55 ! C'est une heure normale pour un dimanche. Sers-toi un rosé, on arrive". Je dis rien mais en mon moi à moi donc en mon for intérieur, je me dis que le garçon doit être bien stressé parce s'inquiéter de notre position pour allumer le barbecue a quelque chose d'irrationnel. À l'approche de la maison, je remarque le nombre impressionnant de voitures mais pense que les banlieusards se promènent au bord de l'eau. Mais surtout surtout, j'aperçois un gars qui me fait écarquiller l'œil droit. Forcément, je le dis au chauffeur "Christophe, tu vas voir comme c'est rigolo, t'es pas obligé de me croire et je ne suis pas folle mais là dans la rue et ben, y'a un gars, on dirait Fabien !" C'est balayé d'un revers de phrase "Qu'est-ce que Fabien foutrait là hein ? N'importe quoi !" Pas contrariante, naïve et crédule en ce 8 mai ensoleillé, je réponds "Mais bien sûr que ferait-il là vu qu'il habite dans le trou du cul de l'Essonne et qu'il a autre chose à faire un dimanche avec sa poulette de Stéphanie que de venir à Saint-Maur". Épisode clos.

On gare la Clio orange guidé par un Christophe, comme si le mien venait d'avoir le permis et qu'il allait tamponner un arbre. J'ai envie de lui dire "Euh il sait se garer surtout que dans cette rue, y'a la Concorde, aucune voiture ; tu devrais plutôt aller taper deux silex, pressé comme tu es pour faire cuire des merguez". Il est remonté comme une pendule et a la tête d'un pitbull. "Qu'est-ce que t'as mon gars ? On t'a vendu une viande qui voulait pas cuire ?"  "J'suis énervé et de mauvais poil" que répond le propriétaire des lieux. Bon, ça démarre cool mais pas d'inquiétude. Chez eux, les plats sont délicieux, les vins s'y accordent, sa poulette de femme une merveille et il fait beau. Donc, je m'en fous. Et me voilà dans l'allée qui conduit au jardin. M'arrive aux oreilles le bel "Happy birthday" de Stevie ce qui me fait dire à Christophe "Tu te rappelles, on a fêté mes 30 ans sur cette zique". Il réagit comme un électrocardiogramme plat et je continue avec le "Souviens-toi, j'étais encore jeunette, c'était hier matin, j'avais pas encore les cheveux rouges comme une Indienne sur le sentier de la guerre, mais c'était moi…" Toujours pas de réaction. Avançons donc ! Maintenant que j'y repense, je me souviens qu'aucun ne marche vite. En principe, Christophe ne court pas, certes, mais là tout de même, il erre tranquillou Milou. Le Christophe qui veut foutre le feu au charbon se traîne genre "J'ai un beau jardin ? T'as vu ? Regarde mes fleurs, mes arbres, mon gazon, mes fenêtres, mes travaux en cours dans la cour". Stop, c'est bon. Je vois que Patricia traînasse aussi. Un train de sénateur s'installe. Finalement, c'est moi la jeune qui m'adapte à des vieux. Du coup, je pense à Marième. Elle a choisi un chouette CD. Elle est trop mimi, m'envoie un clin d'œil pour le 4 mai, je vais lui claquer des gros bécots quand on arrivera dans le jardin d'ici deux heures à l'allure d'escargots dont on fait preuve. J'attaque enfin l'angle de la maison et c'est à ce moment, juste là, comme ça, que je suis devenue "Madame Oh là là".

Je photographie un groupe. J'embrasse des couleurs, des sourires, des chants. Je comprends. C'est impressionnant, imposant, éclatant. Je marche vers vous. Je sais où je vais. Vers l'homme au pull rouge comme si ce frère en m'ouvrant très grand ses bras allait calmer la tempête. Parce qu'il faut bien l'avouer, la tempête est puissante. Je résiste à la vague qui monte. Je vous embrasse du regard. Je vous découvre au fur et à mesure. Ne pas craquer. Je perçois votre émotion autant que celle qui me bouleverse. Vous êtes au rendez-vous qu'il vous a donné. Vous êtes là pour moi, pour lui, pour nous. Tous vos visages, je les ai en mémoire. Ce qui s'est passé est un moment extraordinaire. Vous êtes précieux. Vous m'êtes précieux. Avec chacun d'entre vous, j'ai une histoire. Certaines histoires sont récentes ne demandant qu'à grandir ; d'autres s'enracinent et se consolident ; d'autres encore gravées dans le marbre du temps qui passe sont indestructibles. Vous êtes de belles histoires. Vous êtes magnifiques. 

Quel beau dimanche ! Il y avait tout ce que j'aime : des rencontres, du partage, de l'amitié, de l'amour et beaucoup de joie. Je crois que c'est l'émotion que je préfère : la joie ! 

Merci amis musiciens, merci aux jolies voix qui ont rythmé la journée, merci à chacun d'entre vous et plus particulièrement à Marième et Christophe. Je vous applaudis. Vous pouvez vous applaudir aussi. Vous avez beaucoup de talent. 

Et puis, bien sûr, maintenant, je viens vers Toi. Je t'ai dit il y a quelques années "Je ne sais pas si le Monde a un bout mais avec Toi, j'irai au bout du Monde". C'est toujours aussi vrai. Notre vie m'enthousiasme. Elle est dans le partage avec les personnes que l'on aime et dans les rencontres. Elle est dans la générosité et tu es généreux. Parce que nous avons vieilli, parce que nous avons aujourd'hui une idée de ce qu'est l'essentiel, nous donnons le meilleur de nous-mêmes. Merci pour cette journée magnifique. L'année dernière, c'était chez nous ; cette année, nous étions dans un endroit magique. Et si l'année prochaine, tu réservais le Stade de France. Ce serait chouette non ?